Embrouille à la brouillette

Ouh là là, on dirait bien que Narimen et Paul sont fâchés !

Pourtant, ces deux-là sont bons amis. Dans la classe de Madame Delaclairière, assis côte à côte, ils ne se chamaillent jamais. Au contraire, ils s’entraident ! Par exemple, si Paul a oublié ses crayons, eh bien, Narimen lui prête les siens (sauf le bleu qui est son préféré). Ou alors, si Narimen ne se souvient plus de sa poésie, c’est Paul qui lui souffle tout doucement les mots qu’elle a perdus.

Pendant la récré, on les voit souvent jouer ensemble, courir ou regarder la pluie tomber, et même parfois ne rien faire, et il faut vraiment bien s’entendre pour ne rien faire ensemble. Mais là ça a bardé ! Ils sont partis chacun dans leur coin, en colère. Ce n’est pas malin pour des amis…

Mais que s’est-il passé ?

Bon, d’abord moi je m’appelle Julien, je suis dans la même classe que Narimen et Paul et nous sommes copains. Mais je n’ai rien compris à cette histoire de brouillette qui les a fâchés ! Pourtant, aujourd’hui c’est jeudi, et jeudi c’est le jour où la classe va au jardin des coquelicots. Tous les jeudis, on va au jardin des Coquelicots, même s’il pleut, même si le froid est un peu envahissant dans les gants.

C’est juste à côté de l’école et c’est un jardin partagé, ça veut dire qu’on le partage avec tout le monde, moi j’ai l’impression de l’avoir pour moi tout seul, c’est ça que j’aime. Il y a des pommiers et des jolies pommes rouges, vertes et jaunes qu’on ramasse pour les croquer et pour faire des tartes avec Madame Delaclairière. Ce sont les meilleurs de l’école, elles sont parfaites pour le goûter !

Dans le jardin, on fait toujours des choses différentes. On ramasse des pommes, je l’ai déjà dit, des poires aussi, on étend de la terre sur le potager, on n’oublie jamais de nourrir les oiseaux, et au printemps, quand il fera beau, on plantera des radis, des courges et des poireaux. Aujourd’hui, on a vu tous les outils du jardinier ; la bêche qui sert à retourner la terre, mais la bêche est coupante et coupe les vers de terre, alors on ne va pas s’en servir. On va utiliser la fourche bêche ; c’est une bêche comme une fourche mais ce n’est pas une fourche ni une bêche. La fourche bêche sert à retourner la terre sans massacrer les vers de terre et aussi à ramasser l’herbe, comme la fourche qui n’est pas une fourche bêche, ou comme le râteau qui n’est pas un… Bon ! Pour bien comprendre, il faut les voir.

On a aussi vu le plantoir, la rasette, l’arrosoir et la binette et on a vu auss- AHHHHHH j’ai compris !! J’AI TOUT COMPRIS !

Je vous explique : dans le jardin, il y a un très gros outil avec une seule roue devant, une grosse caisse au milieu pour poser les outils et l’herbe ramassée (avec la fourche-bêche hihihi) et derrière un guidon mais pas comme un guidon de vélo, non, plutôt comme deux bras très fins et très longs. Ils servent à faire avancer la brouette en la soulevant. J’ai soulevé la brouette pour faire le tour du pommier, ce n’était pas facile, il faut être fort et il faut bien faire attention pour ne pas avoir un accident. Un accident de brouette ! VOILÀ ! Voilà j’ai trouvé la solution ! La brouette, OUI, LA BROUETTE !

C’est à cause d’elle que Narimen et Paul se sont mis en colère et ne se parlent plus. Narimen dit que c’est une bourette et Paul dit que c’est une brouillette, et ils croient tous les deux qu’ils ont raison alors ils se sont fâchés à cause de la bourette-brouillette-brouette ! Vous comprenez maintenant ? C’est quand même un peu bête de se disputer à cause des mots qui n’existent pas.

Là, je crois que ça s’arrange, à la fin de l’école ils se sont dit au revoir, un tout petit au revoir avec un tout petit sourire, mais j’ai bien vu que leur grande dispute n’était qu’une petite brouille ; une brouillette, quoi !

Une brouillette ? Mais ça n’existe pas une brouillette…

Toute ressemblance avec des personnages existants, enfants ou adultes, des faits réels et des situations vécues n’est évidemment pas fortuite !